Trente-quatrième jour
Pas de motivation, aujourd'hui, surtout
que j'ai le crâne chauve mouillé par une belle averse. Un moment à
regarder des jeunes footballeurs sur la plage, deux ou trois moments
cocasses. Le mec que tout le monde interpelait, « Oh Aziz ! »,
« Aziz, Aziz ! », je peux pas dire, ça me collait
le sourire. Le chien qui se balade et qui s'arrête le temps d'un
pipi sur la cage, où sont posés les vêtements des garçons,
pendant qu'ils se focalisent sur l'action. Le type qui enlève sa
chasuble, puis qui joue une phase de jeu avec son vêtement dans la
main. Puis il enlève son tricot de corps, découvrant un torse fin
et nerveux, et soudain le ballon lui revient, il fonce vers le but,
balle au pied, la chasuble dans une main, le marcel dans l'autre. Des
musiciens sont passés alors que je sirotais mon thé, ils font la
tournée des terrasses, trois fois que je les entends, ces quatre
vieux, ils font le spectacle, toujours le même morceau mais ils ne
sont pas mauvais du tout. Et ensuite, la pluie.
Trente quatrième jour
La libido. C'est quelque chose que ce
truc. Mais qu'est-ce. Pourquoi soudain m'envahit-elle à nouveau.
Pourquoi je repère autour de moi tous ces petits culs perchés, les
poitrines des garçons, fenêtres ouvertes, les larges sourires ou
les airs sombres. Au Dar Saltane, la douceur d'apparence et la voix
du serveur me troublent. Hier, dans ce salon de thé caché des
touristes, sommet de glauque, le serveur d'une indicible et vulgaire
beauté, se chamaillait, avec de grands rires, et un ami à lui très
taquin. J'avais bien des difficultés à me concentrer sur mon copain
marchand de tapis, Saïd. Qui me paraît seul et triste. A l'image de
cet endroit sans fenêtre, qui recevait très mal la télévision,
sous une lumière blafarde et des murs en zellige bleue. Nous
sirotions un thé à la menthe sur des tables de plastique déjà
anciennes, branlantes, on aurait dit des imitations de table. Sept
dirhams les deux thés. Saïd veut me faire un tajine, ce soir.
Rendez-vous à 19 h, dans la rue de mon hôtel. Un peu peur du
poisson bourré d’arêtes, c'est leur truc, les Marocains, de
Tanger à Essaouira, le poisson grillé, ou en tajine, qu'ils mangent
avec les doigts. Ils s'en régalent, les mufles, et moi je ne peux
qu'admirer de loin, leur joie. Pour me venger, faudrait qu'ils me
voient gloutonner un bon saucisson de Lyon truffé, ou, ah, oui,
cette assiette de cochonnailles chaudes au comptoir du vin,
accompagné d'un bon verre de côte.
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