Il y a toujours, chez les homosexuels,
une population en rupture, des garçons qui irriguent les nuits des autres garçons. Ils sont derrière la porte, avec leur désir impérieux. Et ce mouvement appelé
"Manif pour tous" avait pour objet de
marginaliser encore, et de culpabiliser, de salir, s'il était besoin, ce désir.
Pour ces garçons (en particulier),
avoir une pratique sexuelle est souvent vécu comme une sorte de
suicide social, une honte infranchissable pour certain, un défi
radical à toute la société (et à la famille) pour d'autres, voire
une vengeance - qui s'exprime d'abord sur soi-même. J'ai fait la
mal-rencontre avec le mâle bafoué, la mauvaise particule dans le flux, Salim. Il avait une façon de
faire l'amour... comme s'il cherchait à se délivrer de son
cauchemar. Je sais qu'il se droguait, l'odeur de sa peau se mêlait à
son haleine de nitrite d'amyl, et il exigeait le noir absolu dans la
chambre. Il était gentil. Ma capote a lâché à notre deuxième
rencontre, je ne m'en suis rendu compte qu'en sortant de lui, dans
cette sorte d'exténuation qui s'annonce, j'ai conçu dans son cul ma
petite inquiétude. Je l'ai revu peut-être quinze fois, sans capote,
mon abandon violent multipliait le plaisir. Je me plaçais dans cet
espoir médusant de le garder pour la nuit, je voulais, pour lui,
former chez moi, sur le radeau de mon lit défait, un refuge.
Il
avait la syphilis. Les médecins, me voyant décliner dangereusement,
ont fini par découvrir que je l'avais à mon tour. Il m'a donné
aussi quelques autres petites infections, dont on se débarrasse sans
peine, et un diabète, depuis, s'est déclaré. Le diabète pourrait
bien être lié, si j'en crois une littérature datée de 1920,
trouvée sur la toile, son apparition, pas sa guérison. Bien
entendu, le SIDA aurait bien pu faire partie du bouquet, c'est en
tous cas la conviction des médecins. J'ai tellement envie de revoir Salim, d'éteindre à nouveau toute lumière, d'entendre ses
vêtements tomber un à un, sentir son souffle, la masse compacte de
son corps reposant sur le mien, son désir tremblant, sa fierté, de me donner du plaisir.
Comme lorsqu'il m'a embrassé.
Salim, Salim, si tu vis.
c'est malin... ou c'est le malin.
RépondreSupprimercoco
Si séduisant qu'il ne peut être que le malin, oui, tu as raison.
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