Qu’une âme tuméfiée geigne dans l’ombre ou la splendeur des jardins, des châteaux, les rues de Paris ne s’en souciaient guère. "La vie est tellement dure" me confiait, ingénue, pas tant que ça, mon amie, compagne de voyage. Egoïste, enchanté, le cœur puisant peut-être aux sources de ce malheur (étranger, mais qui avait crevé la nuit ce matin comme une aiguille), la force de son plaisir, de sa joie momentanée, je me suis promené, ces deux jours, à Paris.
Paris n’est pas tout à fait indifférente, elle accueille, elle berce, elle enveloppe. Elle digère.
Samedi un soleil blanc dégueulait sur le trottoir désert et les boutiques prétentieuses des Champs Elysées. Georges V, nous prenions le temps d’un petit tour dans le coin et d’une pause extasiée devant l’architecture béton d’une superbe Caisse d’Epargne. Les cafés étaient vides, les terrasses chauffées. Nous nous y attardâmes une minute avant de s'engouffrer dans l'ombre du cinéma Biarritz Elysée, où mon amie réalisatrice, si talentueuse, présentait son dernier film. Ressortant une heure plus tard à la lumière, nous discutâmes au bord d'un énième expresso, puis je la quittai. Rendez-vous demain dimanche. Je remontai l’avenue fameuse parmi le flot de chinois et de japonais, d’arabes en treillis et lunettes fumées, d’occidentaux en costume, Etoile. Ligne 4, un jeune homme charmant me fit une charmante conversation. Mais c’est lui que j’allais voir et j’en éprouvais, je l’avoue, quelque hâte. Je n’avais jamais encore pu lui rendre cette visite, dans son petit appartement de la rue du Château d’Eau, dans le 10ème arrondissement. Il y habitait pourtant depuis 4 ans. M’avait fait l’honneur de quelques cuites, à Lyon, et c’est curieux. Qu’un amour aussi dense, ce noyau qui semblait toujours plus dur, en moi, cet amour fou. Que cet amour-là put disparaître soudain ou, plus exactement, passer le rideau des souvenirs, sans bruit, sans drame. Ce soir, nous allions boire de concert, comme deux camarades, deux vieux amis. Dans le plaisir serein des retrouvailles.
Des Champs au Chateau d'Eau... Deux mondes.
RépondreSupprimerUn amour qui passe le rideau, c'est bien dit.
RépondreSupprimerEn lisant vite : cuites au château d'eau...
RépondreSupprimer@choule : C'est vrai, c'est Paris, j'adore.
RépondreSupprimer@Loïs de Murphy : En tous cas, ce n'est pas désagréable.
@Chr. Bohren : Alors plutôt à Belleville, ce n'est pas très loin...