lundi 9 mai 2011

Le musée (1) (travail en cours)

Je n'ai pas de souvenir précis.
A ce moment-là, je n'ai pas d'histoire, moi. À raconter.
Je suis quelqu'un de normal, je crois. C'est abominable, comme je suis normal. Ma journée, le matin, le matin je suis à la Ricorée, c'est depuis que j'ai voulu arrêter le café, ce n'est pas bon, le café, à la santé. Puis je réfléchis, beaucoup. Ça peut donner des palpitations.
Si tu en bois trop, du café.
Je réfléchis beaucoup à ce que je vais faire dans la journée.
Les courses, ce que je vais manger, si je vais courir. J'écris. Du papier, des cahiers, du scotch, des stylos, j'achète des stylos bille et des feutres, ça s'use vite, alors j'aime en avoir d'avance. J'écris ma liste de courses.
Ma liste ? Elle ne change pas, enfin, il y a les jours je n'ai plus de produit, faut ajouter le produit. Le sel, beaucoup de sel, de bicarbonate, des trucs que j'ai lus sur internet, après tu mélanges.
Mais ma liste, ma liste, pourquoi vous vous intéressez à ma liste. Une orange par jour. C'est bon pour la santé les oranges. Du café, avant je mettais du café. De la viande, une fois par semaine. Des légumes pour la soupe, navet, carotte, pomme de terre, poireau, et d'autres légumes encore, comme ça me vient, je ne sais pas, moi, la liste, elle peut changer, c'est pour ça que je la fais chaque jour, et c'est pour ça qu'il me faut réfléchir. Ce n'est pas mauvais pour la santé, de toute façon, réfléchir.
Du chocolat, mais souvent, je ne l'écris pas, ce n'est pas bon pour la santé le chocolat.
Le sel, le bicarbonate ? Ah mais je l'ai dit c'est pour le produit. Je mélange. J'ai besoin du produit, c'est pour mon musée. Je ne sais pas si ça intéresse du monde, mon musée, c'est personnel un musée, c'est comme n'importe qui, on vit, et on garde des souvenirs, moi c'est parce que je n'ai pas de souvenir, alors je fais un musée.
Comme ça, je peux me rappeler, j'ai connu cette personne, j'ai aimé celle-là, d'ailleurs, mon musée me permet d'entretenir le plaisir que j'ai eu à rencontrer les gens. C'est incroyable, ce plaisir-là est incroyable, n'est-ce pas, je n'en ai pas toujours eu conscience. La première fois c'était un jeune homme, jeune, je dis jeune, il avait mon âge, il traînait dans un bar, il m'a invité à boire un dernier verre chez lui. Beau garçon, je crois.
Je l'ai jeté assez vite.
A cause de l'odeur.
Et puis après, un couple. Une belle femme, je crois, et un garçon pas mal. Nus, l'un à côté de l'autre, ils avaient de l'allure.
Mais pour les garder entiers, c'était compliqué, il aurait fallu des vases énormes, alors je n'ai gardé que leurs têtes, dans des aquariums de formol.

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