Dans ce lit je rêve, parfois. Souvent j'ai des cauchemars. Un cauchemar. Il faut dire que je ne digère pas très bien, je n'ai jamais très bien digéré, mais je nie jusqu'à l'absurde avoir des
troubles du sommeil je dors très bien, à cette époque. Ma chambre est doublée d'une mezzanine où je tiens presque debout et c'est là que j'ai mis mon lit. Un escalier de bois, qui sonne clair, y mène.
Ce sont des pas dans l’escalier qui m’alertent, trois coups clairs secs sur les marches de bois, l'inconnu qui me veut du mal monte à la mezzanine, il va très vite, je me redresse, frissonnant d’horreur à l’idée d’apercevoir le personnage façonné d’ombre, je pense que je dors, je sursaute, il me faut lutter pour me réveiller, lutter pour me réveiller, l'inconnu prend son allure humaine il entre chez moi et endosse ma veste, je me réveille il est encore là je me réveille il est encore là je me pince et je me réveille il est encore là. Trois coups clairs secs sur les marches de bois il n'a pas de visage. Mais, non. Non ! Ce n'est pas cette vision qui soudain me touche comme une main. C’est toi, ton cartable à bout de bras, tu jubiles en regardant ma tête ébouriffée, ma terreur d'enfant, puis ma joie qui descend tel un sanglot.
Je sursaute je prends ma respiration j'aspire tout je me rassemble je vais me noyer dans l'infini gazeux de mon rêve et je crains de me voir exploser exploser exploser dans l'espace de ma chambre j'ai peur de mon inconsistance, terrorisé de me sentir la proie d'un songe cotonneux, vaporeux, la proie d'une ombre, j'ai peur, j'ai si peur du face à face, je peux exploser, mes tripes cherchent une sortie, je me rassemble avant l'éparpillement, j'aspire tout je me remplis je me sais impuissant dans l'infini qui va s'ouvrir, une énorme langue de cauchemar va chercher à me laper l'intérieur, à me digérer, à m'émietter, à me cochonner, je me prépare à lutter je ne veux pas je ne veux pas je ne veux pas.
Mais c'est toi. C'est toi qui surgis, ce beau matin, c'est toi, tu jubiles, heureux de ma surprise, tes bras en croix, ton cartable noir et vide se balance au bout de ta main droite, et j'ai soudain le corps qui exulte, je suis là j'existe j'existe c'est super vive la vie je suis un avec mon corps, et ce n'est même plus une idée, je suis complet, je pèse mon poids sur ce monde parce que tu es là.
(à suivre)
(à suivre)
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