Je suis ennuyé car je ne retrouve pas, en ce moment, cet état de ferveur qui est l'objet de ma recherche, il me permet de plonger à l'intérieur du langage, j'en conçois le sens avec une jouissance qui est mon projet d'écriture même.
Tentative par les mots : ce qu'ils provoquent. La chaîne des mots jusqu'au point qui termine la phrase. Difficulté : choisir le premier. Il faut créer le trouble. Un verbe, à l'infinitif, c'est d'abord ce qui me vient. Chercher. Mourir. Abandonner. Tiens, « abandonner » semble convenir, pour l'instant. C'est bizarre, car je considère les verbes comme gênants, ne générant que des objets et des formes trop simples, bateaux. Il faut en général que je me débarrasse de cette encombrante légion de verbes. Il m'arrive d'en faire une liste, pour qu'ils cessent de réclamer. « Chercher » revendique une place que je ne peux lui donner car je me perds dans ce mot qui est une galaxie. « Abandonner » est une locution dans laquelle je me sens bien. Je vais en gommer la forme verbale et n'en garder que le substantif : « Abandon ».
L'abandon nu aux caresses du ciel est une intense agression de force vitale. Il y a la brûlure lente, inexorable, du soleil sur la peau, blanche, la douceur d'un vent frais qui me soulage. La mouche qui se pose sur ma cuisse et m'agace. Je n'ai qu'une certitude. Je suis vivant.
A force d'essayer, de ne pas me satisfaire des phrases que je m'oblige à aligner sur la feuille, il me vient comme une impatience.
Je me réjouis de l'impression générale, la page qui se noircit. J'ai écrit. Le travail avance.
Mais je tourne en rond.
Comme le billet précédent, ce petit texte est extrait de mon troisième roman, Eugène, écrit en 2004-2005, un truc dans le genre. Je retombe dessus par hasard (désœuvrement).
RépondreSupprimermoi aussi dans un tiroir (en fait, une nouvelle parue dans Télérama illustrant une photo de Cartier-Bresson) : "Aban-don. Drôle de cadeau, oui."
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