vendredi 6 juillet 2012

Mes carnets du Maroc (8)


Hier (troisième jour)
Je me suis perdu dans Casa. Un vrai délire, cette ville. Dénuée de points de repères, immense, diverse, les trottoirs défoncés, les ruines et les terrains vagues jouxtant les hôtels Sheraton ou les mosquées, toujours chéries et soignées, mais, je dois dire, pas envahissantes. Des travaux dans toute la ville rendent l'impression de décrépitude plus importante, le tramway. Un réseau de transports en commun ne sera pas du luxe, mais pour l'instant, c'est le plus délirant bordel qu'un aménageur puisse imaginer. Des places entières sont condamnées, avec des passages pensés pour les automobiles, et rien, mais alors rien, pour les piétons. Sur une place où se succèdent toutes les lignes de bus de Casa, il doit y en avoir six ou sept, pas un endroit prévu pour la circulation des piétons, ni même une aire sécurisée pour attendre le bus. Si bien que des milliers de Marocains se retrouvent ici entre les voitures, s'imposant à elles, au milieu des klaxons, dans la poussière, ou se réfugiant sur un chétif morceau de trottoir sablonneux, jonché de détritus et qui sent d'ailleurs la poubelle. Le nom de cette place ? Je suis in-foutu de le dire. Je ne suis pas certain que l'ensemble des Marocains que j'ai croisé ce jour-là aurait su me le révéler. Je n'ai pas trouvé de plaque indicative, mais sans surprise. J'étais perdu déjà depuis un moment, mon plan à la main, en pleine nuit, et je me désespérais de trouver une plaque de rue quelque part. Il y en a ici ou là, il faut avoir du bol, et que les rues ainsi reconnues soient aussi marquées sur le plan. Les Marocains sont très souriants et serviables, donc, il suffit de demander. Salam aleikoum, bonjour, pouvez-vous me dire où je suis ? « Maarif ». Oui oui, mais encore ? Connaissez-vous le nom de ce boulevard ? Non ? Bien bien bien. Et comment je fais, moi. Si on dit bien Cassaouite, ce gentil Cassaouite a tout de même réussi à participer à mon sauvetage. Tout droit tout droit, puis à gauche puis tout de suite à droite, tout droit tout droit, ce sera le Boulevard Mohammed V. Et je connais ce boulevard. Choukrane. Beslama.

Troisième jour
Des garçons des garçons, que ça, des quantités, beaux, glabres et bronzés, de quoi devenir dingue. Des numéros de téléphone en veux-tu en voilà, des rendez-vous, à 18 h, à 19 h 30, à 20 h, demain matin ? Maintenant ? C'est du pur délire. Je me doutais bien que ce n'était pas sur ma seule gueule et je me suis d'ailleurs rendu compte que ma phrase de présentation, sur le site de rencontre où je croise tout ces gazouillis (un masculin de gazelle à ma sauce, gazelle désignant ici, pudiquement, les femmes prostituées, les femmes à touristes et, au delà, les femmes sexys), n'était pas pour améliorer la chose : mon cynique « shopping and fucking », arboré sur le site de rencontre, était pour le moins ambigüe. Tous, peu à peu, ont abordé (et sinon je les ai aidés à le faire) la question du « pourboire ». L'un d'eux, qui m'a depuis donné son numéro de téléphone, s'est excusé en me racontant qu'il fallait bien payer le loyer pendant ses études. En fait, je pourrais n'écouter que mon désir de salaud, payer, une somme qui devrait être à peu près acceptable, et niquer, ou même faire l'amour, à un de ces jeunes hommes magnifiques. Non, c'est non. Je le ferai le jour où je voudrai m'avilir. Avec un pote, on louera une maison, chacun sa chambre.

Quatrième jour
Maman, je veux te dire un truc, je suis pédé.

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