mardi 27 novembre 2012

Mes carnets du Maroc (47)

Vingt-septième jour
Le couscous de Khadija gonfle mon ventre. Un régal, avec plein de légumes, et une semoule roulée à la main. Je m'allonge. Je me rends compte que je ne suis absolument pas au courant du résultat de l'élection présidentielle. C'était le premier tour aujourd'hui, j'espère que Nicolas Sarkozy fait déjà ses bagages. Ma digestion risque d'être difficile, mais je suis optimiste.

Vingt-huitième jour
« Sarkozy il a perdu et la fille Le Pin il fait 19 % je crois. Andy ! Andy ! »
Khadija appelle son mari qui travaille à l'étage.
« Le Monsieur il voudrait savoir le résultat des élections ».
Andy apparaît alors, grand échalas perpétuellement coiffé de son chèche. Sous une moustache drue, la voix tonne, toujours un peu l'impression qu'Andy ne contrôle pas tout ce qu'il dit, au moins en français.
« Ah alors Hollandaise 29, Sarkozy 26,5, Le Pen 19.
- C'est beaucoup...
- Ah oui, beaucoup. Ils disent que Sarkozy ne peut plus gagner »
En vain je demande le score des communistes, c'est comme ça que je désigne le Front de Gauche, pour être plus compréhensible, et la seule réponse de mon interlocuteur me paraît significative. Pour lui, ce résultat n'intéresse que les Français, et les chaînes de télévisions de langue allemande ou arabe ne donnent pas cette information. J'espère que Mélanchon saura capitaliser, euh, disons prendre appui sur sa campagne pour le troisième tour, au moins aussi important que les deux premiers : les législatives. Les résultats définitifs me font penser que dans une pure logique droite / gauche, rien n'est joué. Mais les électeurs de Le Pen sont par définition plein de rancœur vis à vis de la droite traditionnelle et du pouvoir en place et même si le report est largement en faveur du candidat de droite, il n'est pas massif. De même, ceux qui ont préféré François Bayrou l'ont souvent approuvé, ces cinq dernières années, lorsqu'il était, d'évidence, le premier opposant de Monsieur Sarkozy, et je sais que beaucoup d'électeurs traditionnellement à gauche, mais bernés par l'apparent réalisme du discours centriste, se sont, depuis 2007, tournés vers l'ancien ministre de l'éducation d'Edouard Balladur. Les réserves de voix du sortant sont de 20 %, pas plus. Quant à Monsieur Hollande, son statut d'unique alternative à une deuxième catastrophe sarkozyste devrait le protéger, au moins en partie, de cette défiance bien légitime qu'un « peuple de gauche » entretient vis à vis du Parti Socialiste, et en particulier depuis que, derrière François Hollande, il s'était prononcé pour la constitution européenne de Giscard d'Estaing. Ne pas oublier pourtant d'aller porter l'estocade, le 6 mai. Et de donner une majorité de gauche, mais composite, avec le Front de gauche, à Hollande. Qui d'ailleurs me semble être la personne idoine, l'homme des discussions, des compromis, tel qu'une majorité hétéroclite aurait besoin. Tel qu'un régime parlementaire aurait besoin, en fait. Cqfd.

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